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 Pour qui sonne le glas - [huyana/libre: défi]

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Huyana A. Livingstone
Huyana A. Livingstone
Chants : 401 Arrivé(e) le : 23/07/2014
Avatar : Troian Bellisario

Age : 36
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MessageSujet: Pour qui sonne le glas - [huyana/libre: défi]   Pour qui sonne le glas - [huyana/libre: défi] EmptyDim 27 Juil - 22:37

Défi- Huyana


Pour qui sonne le glas

Cela fait désormais un quart de lune, oui, au moins ça, que je suis éveillée. Lutter pour me rendormir ne sert à rien –l’expérience a trop longtemps été infructueuse. Je me suis emparée de mon carnet feuillu de dessins, dont la plupart des pages commence à se désolidariser de l’ensemble pour s’envoler et aller vivre leur vie, aller faire rêver –ou apeurer- le passant qu’elles croiseront. Un crayon de bois, une petite lumière tamisée, c’est, non pas mon remède, mais mon addiction –une parmi tant d’autres-. J’ai mis ce petit matériel sous mon bras, et, vêtue d’une chemise légère, d’un pantalon en lin clair, j’ai passé une grosse écharpe autour de mon corps –trop brouillon, mon geste, pour pouvoir dire qu’elle se situe désormais de manière à enserrer mon cou- et suis sortie, telle une artiste voulant échapper à la foule venue réclamer des signatures sur des reproductions de moindre qualité, par la porte de la véranda, c’est-à-dire celle de derrière, qui donne sur mon jardin. A peine un bruit étouffé de la maison qui s’est refermée derrière moi, et semble avoir doucement expulsé le seul membre qu’elle paraît apte à accueillir (je demeure désespérément seule, je dois porter une tare que je ne comprends pas- bref). Mes carnets et mon crayon accompagnés de moi-même, je leur ai fais –encore une fois- la visite de ce lieu si familier et hostile de moi : la réserve de Blackfeet. Je marchais sans prêter attention au lieu où me mènent mes pas, au moment où je suis arrivée au pied du totem, de ce totem. Celui qui symbolise toute une culture, des dogmes, mais qui ne modifie en rien mon train de vie. Les esprits, c’est pour les autres. Je suis déjà suffisamment gâtée comme ça, je préfère être à la carte des abonnés absents que de vivre dans cette folie, ce manège par procuration. Tout ça, c’est pour nous déresponsabiliser, et pour nous faire faire pardonner –la vengeance des esprits, c’est l’assurance de voir notre dette payée pour la plupart des résidents d’ici-. Néanmoins, la forme alambiquée, les couleurs passées et la lumière de fonds que mes yeux me permettent d’admirer, me poussent à faire une halte. La lune n’est pas pleine, mais j’arrive malgré tout à perçevoir la plupart des détails qui figurent sur cet objet intriguant. Et mon crayon balaie mes pages de dessins. Les heures passent et je ne compte pas les minutes. Le sablier du temps est pour moi aboli, je ne verrai pas les chevreuils passer, je n’entendrai pas les oiseaux commencer à chanter au moment de l’heure bleue. Sans tabouret ni autre objet pré-fabriqué humain que ce crayon et ce morceau de bois recomposé, retravailler pour en faire du papier, j’entretiens ma légende, celle de la fille artiste et autodidacte, qui peut laisser son esprit divaguer à l’odeur des fleurs d’un pommier, ou entrer dans une conversation animée pour la défense de l’existentialisme et des responsabilités humaines. En tracant mes courbes sur le papier, je ne peux cesser de penser à notre histoire, à Skah et moi, à la réserve, à tout. A tous mes problèmes. Soudain, mon crayon se bloque sur la feuille. Un bruit singulier et inhabituel a alerté mes capteurs de défense qui sont désormais au rouge. Un grognement sourd se fait entendre dans la pénombre, derrière mon dos. Je ne me retourne pas, évidemment. Ce serait trop facile de devenir proie ainsi –et de mourir si bêtement-. En vivant dans une réserve et en voyageant, on apprend à devenir malin. J’aperçois dans la fenêtre du bâtiment qui se trouve en face de moi, au moins 15m derrière le totem, la silhouette d’un animal sauvage. Une espèce inconnue de moi –et de mes livres. Une espèce qui se rapproche. Dangereusement. Bien trop dangereusement à mon goût. Alors que je sens son souffle et ses grognements dans mon dos, je représente dans mon esprit éveillé la bête qui me reluque : elle doit être sur ses deux pattes arrière, pas moins de 2m de haut, 300Kg étant donné la difficulté avec laquelle elle semble respirer –on dirait un « couch potato » en surpoids qui aurait un rhume et refuserait de se moucher le nez-. Je n’ai pas l’habitude d’avoir peur. Ma mère m’apprenait quand j’étais petite à ne jamais rebrousser chemin, et à avoir du courage en toute situation, car en manquer ne me sauvera jamais. Je n’ai jamais failli. Ni avant, ni cette fois-ci. J’en ai décidé ainsi. La bague que je porte à l’auriculaire depuis mon mariage avec Skah –oui, je l’ai conservée ; puisque le « Blanc » sera toujours pour moi le pollen qui crée la fleur, le soleil qui lui permet d’éclore- semble plus chaude et plus serrée qu’à l’habitude.  Est-ce un signe ? Certains me l’affirmeraient avec insistance, que je n’en croirais pas davantage. Si ce qui est arrivé n’étais pas arrivé. Alors que l’animal se faisait plus proche de moi encore à chaque seconde, et que son souffle glaçait la racine de mes cheveux, j’invoquais mon courage et ma mission en cette réserve, celle de reconquérir ma place et d’accomplir ma destinée, c’est-à-dire de pourrir à la racine les projets abjects qui se profilent à la réserve. Et, au fonds de moi, une autre pensée pour Skah –j’appréciai en ce moment même que personne ne puisse se rendre compte de ce qui se passait en moi, que derrière l’indifférence ou la distance que je voulais prendre avec lui, il n’en n’était rien dans mon cœur-. Je choisis alors de détourner mon regard vers la bête. Yeux dans les yeux, nous communiquions-ou quelque chose de semblable se produisait. Chose qui ne m'était jamais arrivée auparavant.. L'animal, toujours indistinguable de moi par la faible luminosité et le brouillard qui se profilait devant mes yeux (au fil des nuits vécues bien loin de mon oreiller), bien qu'à portée de main, avait des pupilles claires, semblables aux reflets visibles dans la Perle Bleue du Népal ce grand lac d'eau douce qui attire tant de visiteurs. Inconsciemment, je percevais le message que je lui envoyai, celui d'une étrange créature innocente, et loin d'être hostile. Je pensais que ce n'était, en fait, qu'un souhait, que la bête aller ouvrir sa gueule et me laisser me fracasser contre ses dents -ce qui aurai d'ailleurs peut-être été préférable pour tout le monde-, mais son recul progressif me contredis. L'animal s'éloigna doucement. Incompréhensible. Impossible. J'ai du rêver. Personne n'aurait pu sauver sa carcasse, si robuste soit-elle d'une telle rencontre. ET pourtant, je sens encore les globules rouges traverser mon corps, quelques fourmis me piquer le bas des jambes. Un esprit aurait-il été avec moi il y a quelques secondes?
Je me sens isolée, à cette idée. La lueur désormais blanchâtre à l'horizon, qui se tente d'un bleu pâle, et le vent qui s'amuse à glisser entre mes cheveux, renforcent cette sensation d'éloignement d'une autre forme de vie humaine -psychologiquement et physiquement-. qui pourrais comprendre ça? Je me serais tenue pour folle moi-même, si je l'avais pu...
Sans plus attendre, mes jambes déclarent forfait et je m’affale au sol, seule, pensante, et flageolante. Mes dessins demeurent intacts, seule un éclat de bave crée sur le papier une tache qui s’étend sur environ 5cm, une tache non transparente comme devrait l’être celle d’une bave, mais rouge –d’un rouge pourpre, couleur de sang-. J’aurai bien aimé tenir entre mes mains un bon chocolat chaud, histoire de palper la vie, la VRAIE, celle à laquelle je suis sûre que je peux croire ; et surtout, afin de me sortir progressivement de cette torpeur dans laquelle j’étais entrée sans m’en rendre compte, au fil des heures passées devant ce totem. Le soleil sort tout juste de sa nuit et rougit de suffisance. J’attends les premières ouvertures de portes, les premiers réveils, les premières angoisses de ceux qui dorment la nuit et laissent leurs préoccupations pour le lendemain..

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